04 · Faune et flore du Calenardhon

Les prairies
Lorsque les Hommes du Gondor poussèrent leurs premières explorations vers le Nord et commencèrent à s’établir dans cette terre verdoyante qu’ils baptisèrent Calenardhon, ils furent stupéfaits par la hauteur de l’herbe ; dans les territoires les plus riches de l’Ouestfolde, cette hauteur atteint parfois 1,50 m à 1,80 m et de tous les endroits où l’on distingue les montagnes, l’herbe mesure plus d’un mètre. Pour les premiers colons et les soldats des garnisons, l’herbe était à la fois une bénédiction et une malédiction. Une bénédiction, car elle permettait de nourrir de grands troupeaux de Kines sauvages, d’antilopes et autres cervidés. Une malédiction, car elle rendait très difficiles les déplacements à pied, surtout pendant les mois chauds de l’été lorsque l’herbe luxuriante est à son plus haut.
En ces jours anciens qui voyaient la naissance du Royaume Méridional, l’herbe haute était le trait dominant du pays. Reliée à de fortes racines enfoncées profondément dans le riche sol noir et épais, l’herbe se fanait tous les hivers et recouvrait le sol, le nourrissant. Les Hommes du Gondor découvrirent rapidement cette couche fertile, exceptionnellement épaisse, qui promettait de fabuleuses récoltes de grains. Après l’introduction dans la région de la charrue au soc en acier, une nouvelle vague de colons livra entièrement l’Estfolde à la culture. l’Ouestfolde suivit rapidement après. Les principales céréales étaient le blé, l’orge et le seigle. Après la Grande Peste, les terres ne furent cultivées, au mieux, que sporadiquement et les marchés devinrent incertains. Comme la population quittait peu à peu la région, l’herbe haute surgit de nouveau et, en peu de temps, le Calenardhon fut de nouveau noyé sous un océan de verdure, bien que l’herbe n’atteignit jamais plus les 1,50 m à 1,80 m des origines ; malgré tout, l’herbe des pâturages de l’Ouestfolde demeura sans rivale par sa longueur et sa qualité dans toutes les Terres du Milieu. Loin des montagnes, dans les Emnets, l’herbe pousse à une hauteur raisonnable. Ces pâturages, bien que n’étant pas aussi riches que ceux de l’Ouestfolde ou de l’Estfolde, sont parfaits pour le bétail et les chevaux. Dans le Wold, l’herbe courte et élastique convient aux moutons ; malgré tout, le manque d’eau, surtout lors d’un été sec, limite le nombre d’animaux qui peut y paître
Dans les jours anciens où l’herbe était plus haute, des aurochs, ou Kines sauvages, étaient les principaux herbivores de la région. Ce petit herbivore trapu se déplaçait en troupeaux de 50 à 100 têtes. Lorsqu’ils étaient menacés par un prédateur — un chat des prairies, une meute de loups ou par des chasseurs — le troupeau faisait retraite en une masse compacte, présentant aux adversaires une redoutable barrière de cornes noires. Les hommes considéraient la chasse au Kine sauvage comme un travail plutôt qu’un sport, sauf pendant la saison de l’accouplement (juillet-août) lorsque les jeunes taureaux foncent sur tout ce qui bouge. Même les femelles chargeront pour protéger leurs petits. N’ayant que peu d’ennemis naturels, ces herbivores prospérèrent jusqu’à ce que les Hommes commencent à les tuer pour leurs cornes et leurs tendons qui sont utilisés dans la fabrication des arcs composites. Les pâturages se transformant de plus en plus en terres de culture, les Kines sauvages virent leur nombre se restreindre graduellement jusqu’au point de devenir rares dans le pays.
Les arbres
À l’arrivée des Hommes, il n’y avait que peu d’arbres dans les prairies. Aucun ne présentait un quelconque intérêt commercial. Les colons venus du Gondor plantèrent des arbres le long de la Grande Route Ouest et près de leurs demeures ; dans l’Ouestfolde — et surtout dans la région de Dunlostir — ils plantèrent des bosquets et des vergers. Les saules et les aulnes poussent sur les rives des cours d’eau et près de l’Entévière. Les pentes des Montagnes Blanches sont recouvertes d’arbres utiles à la construction. Les sapins y poussent, plus hauts et plus droits que sur le versant sud et sont par conséquent utilisés comme mâts sur un grand nombre de navires du Gondor. Le mélèze fournit les planches des embarcations qui naviguent sur l’Entévière. Les difficultés du transport freinent l’exploitation intensive des vastes forêts d’arbres feuillus poussant sur les pentes inférieures des montagnes et des collines de l’Estfolde, mais ces forêts de chênes, de noyers et de hêtres sont dignes d’intérêt pour une autre raison ; elles abritent de nombreux sangliers, surtout dans l’Estfolde et dans le Bois de Firien.
Les animaux dangereux
Les sangliers sont chassés pour le plaisir et c’est un sport dangereux. Un sanglier adulte mesure entre 1,20 m et 1,50 m et est armé de deux défenses longues de 20 à 30 cm. Cet animal féroce, doté d’un tempérament irascible, vit au plus profond des forêts ou dans des fourrés denses d’herbe haute ; il charge sans avertissement. Même les laies sont difficiles à tuer. Il est arrivé que des spécimens exceptionnels terrorisent une région entière. Durant les mois d’été, les cochons sauvages s’aventurent souvent dans les prairies. Ils n’ont pas peur des hommes et aiment dévaster le campement des voyageurs.
Le chat des prairies fut autrefois le prédateur dominant du Calenardhon, mais leur nombre a diminué dramatiquement depuis que les hommes ont décimé les troupeaux d’aurochs. Ces chats, à la robe couleur chamois, sont à présent rares ; leur taille est intermédiaire entre celle d’un chat sauvage et celle d’un puma. Pendant l’été, leur fourrure absorbe tellement de pollen d’herbe qu’elle vire au vert clair. Pour chasser, ils bondissent sur le dos des Kines ou des antilopes et enfoncent leurs longues griffes acérées dans le cou de l’animal s’accrochant jusqu’à la mort de ce dernier. Ensuite, ces gros chats ont un festin royal. Ces félins ont parfois attaqué, par accident ou par jeu, des hommes de la même manière. Leur miaulement avide de sang est particulièrement angoissant lors des longues nuits sombres d’hiver.
Les loups gris, autrefois communs dans les plaines du Calenardhon, ont également vu leur nombre décroître proportionnellement à l’établissement des colons. Ceux-ci ont, en effet, exterminé les plus grandes meutes ; le Roi offrait même 2 po par loup abattu, à condition de présenter les oreilles et la queue. Après la Peste, les soldats en garnison durent batailler longuement pour empêcher les loups de proliférer à nouveau. Pourtant, ils ne s’attaquent que rarement à l’homme sauf s’ils meurent de faim ou s’ils sont contraints au combat. Des meutes importantes venues du Nord traversent parfois le Celebrant lorsqu’il est gelé (ce qui n’arrive que pendant des hivers extrêmement rigoureux), terrorisant les colons des terres civilisées.
Les ours noirs et bruns vivent dans les montagnes. Les ours noirs, s’ils ne sont pas provoqués, sont rarement dangereux pour l’homme ; par contre, les ours bruns — énormes et effrayantes créatures qui peuvent atteindre plus de 3 m de haut dressé sur leurs pattes arrière — attaqueront s’ils sont de mauvaise humeur, surtout durant les jours chauds de l’été. Ils ne sont pas nombreux, mais les chasseurs de trésor explorant leurs cavernes et les meilleurs de plantes médicinales ont toutes les chances, un jour ou l’autre, d’être attaqués par un ours brun. Ces deux types d’ours ont été vus parfois jusque dans les plaines, surtout près de la Snawburna, attirés qu’ils sont par la présence de nombreuses truites.
L’unique serpent venimeux du Calenardhon, l’aspic vert, est rencontré partout dans les prairies, surtout dans celles du quart Sud de l’Estemnet ; il vit dans des terriers communs, habituellement des terriers de lapins qu’ils utilisent après avoir dévoré leur habitant. L’aspic vert aime se tenir sur le versant ensoleillé des collines ; on peut ainsi rencontrer sur le même versant une cinquantaine de ces reptiles se réchauffant au soleil, non loin de leur trou. Les spécimens les plus grands sont aussi longs que le bras d’un homme fort ; leurs corps lents et bouffis s’effilent en une queue et une tête minces. Les glandes à poison sont situées derrière les yeux qui se gonflent lorsqu’elles sont pleines. Ces reptiles dégagent une odeur nauséabonde semblable à celle de fraises pourries. Les chevaux craignent énormément les aspics verts et sont susceptibles de devenir incontrôlables en leur présence. La morsure de ce reptile, bien que rarement mortelle, cause une douleur horrible dans la partie du corps affectée qui prend alors une teinte jaune-vert et pourpre. Les tissus près de la morsure deviennent gangréneux et se détachent, exposant l’os. Parfois, c’est toute la partie en dessous de la plaie qui est ainsi dénudée. La victime souffrira de fièvre intense, d’hallucinations et sera incapable de quoi que se soit durant au moins trois jours.
Il existe, dans ces plaines, des nids d’abeilles terrestres. Ces démoniaques insectes piqueurs, jaunes et noirs, font leurs nids dans des terriers abandonnés et les défendent avec acharnement. Un cheval qui aura le malheur de poser le sabot sur l’un de ces nids s’enfuira, pris de panique, à sa vitesse maximale et tentera par tous les moyens de désarçonner son cavalier. Les piqûres sont douloureuses et, si elles sont nombreuses (30+), peuvent causer une paralysie et une faiblesse qui dureront de 6 à 8 heures. Le miel caché au fond du nid souterrain attire les ours dans les prairies.
Le petit gibier
Deux types de renards — l’un blanc, l’autre rouge — chassent les lapins, rats, mulots, campagnols et autres petits rongeurs. Le renard blanc, dont la fourrure vire pendant l’été au vert clair, est en fait gris argenté ; leur pelage d’hiver tacheté d’argent, long et fourni est très recherché et payé cher. Le renard blanc vit dans un terrier et craint énormément les hommes. Les renards rouges sont, eux, de rusés voleurs. Ils semblent prendre plaisir non seulement à voler les poussins et autres volailles de basse-cour, mais aussi des petits objets brillamment colorés. Leur magnifique pelage écarlate semble être une flamme vivante dans l’herbe verte des prairies.
Les oiseaux
Le Calenardhon étant situé au milieu de la grande route migratoire Nord-Sud des Terres du Milieu, les oiseaux migrateurs de tous types y abondent et la population d’oiseaux varie grandement d’une saison sur l’autre. Cygnes, oies et canards sont rencontrés le long de l’Entévière et près des nombreux ruisseaux dévalant des Montagnes Blanches. Les cygnes et les canards restent près des cours d’eau, mais les oies, en bande de plusieurs centaines d’individus, sont une menace pour les récoltes ; elles peuvent ravager les champs de blé d’hiver nouvellement germé.
Le tétras et le grand faisan vert sont les principaux oiseaux des prairies. Les Tétras, que l’on trouvait jadis surtout dans les Emnets, se sont répandus dans toute la région depuis que les hommes cultivent l’Estfolde et l’Ouestfolde. Leur chair blanche une fois rôtie est succulente. La plupart sont bruns avec des taches noires et ont la même taille que les poulets domestiques. L’appel du mâle, lors de l’accouplement, ressemble à un soufflement à l’intérieur d’une bouteille. Ils vivent dans des nids bien cachés, faits d’herbes tressées. De la fin de l’été au début du printemps, les Tétras s’occupent de leur couvée pouvant comprendre jusqu’à une douzaine de poussins.
Le grand faisan vert mâle est doté d’un magnifique plumage couleur émeraude. Sa queue, qui mesure environ 60 cm, donne l’impression que se sont d’énormes oiseaux. Les combats qu’ils se livrent entre eux, pour la possession des femelles, sont réputés pour leur impétueuse exubérance. Les mâles se jettent sans cesse l’un sur l’autre jusqu’à ce que l’un des protagonistes se retire, épuisé ; malgré cette violence, ils ne s’infligent que peu de blessures. Les femelles — dont le plumage est vert olive — pondent de 2 à 5 œufs directement sur le sol et refusent de les abandonner jusqu’à leur éclosion. Le mâle et la femelle sont aussi succulents l’un que l’autre. La saveur particulière de l’oiseau ne s’obtient qu’après l’avoir suspendu, vidé de ses entrailles, pendant plusieurs jours jusqu’à ce que la tête se sépare du cou.
Les faucons et les éperviers sont utilisés pour chasser le tétras et le grand faisan vert, mais aussi les canards, les oies et les lapins. De nombreux faucons migrateurs descendant du nord, le long des flancs des Monts Brumeux, survolent chaque printemps et été le ciel du Calenardhon, au-dessus des Gués de l’Isen. Ils sont attirés par la présence de poulets servant d’appât et sont pris ensuite dans des filets. Après un dressage qui dure une ou deux saisons, ils peuvent être vendus un bon prix — plusieurs pièces d’or pour chaque rapace.
Les aigles nichent dans leurs aires à flanc de haute montagne escarpée. Considérés comme des animaux sacrés, ils n’ont jamais été chassés, même lorsqu’ils volent un mouton ; ils peuvent, très rarement, emporter un enfant. Parfois, un Grand Aigle, énorme rapace possédant une intelligence quasiment humaine et capable de transporter un homme adulte, peut être vu planant haut dans le ciel : c’est une vision rare et prodigieuse.
Les herbes médicinales
Plusieurs herbes médicinales peu communes poussent dans les Montagnes Blanches. Les herboristes les payent un grand prix, surtout celles soigneusement préparées et conservées. Les Calenardhoniens prisent par-dessus tout le Jojopopo (Traite-engelure) dont les feuilles grises ne se trouvent qu’à la base des glaciers de la région des hauts pics. Les voyageurs randonnant en montagne (surtout pendant les mois d’hiver) devraient en acheter, car il soigne les gelures. Les forêts d’épicéas sur les pentes des montagnes portent une plante grimpante parasite appelée Winclamit dont les fruits verts, ressemblant à la prunelle, ont un grand pouvoir de guérison ; cependant, cette plante ne pousse pas là où leur arbre-hôte est largement mis en coupe. Autrefois, les hommes du Gondor cueillaient les pétales argentés du Tyr-Fira qui pousse à la base des glaciers de haute montagne ; comment cette plante, réputée pour ses vertus de résurrection, pouvait résister à un tel environnement reste du domaine des conjectures. L’Athelas était planté, ici et là, le long de la Grande Route Ouest, mais ses pouvoirs de guérison et de restauration furent, peu à peu, oubliés de la multitude après la Grande Peste.
Absorbé en doses infinitésimales, le poison séché dans les glandes de l’aspic vert a la réputation, pour les Orientais et les tribus au Sud du Lointain Harad, d’avoir des vertus aphrodisiaques ; ingérée en doses massives (2 à 3 glandes), cette substance agit comme un puissant régénérateur d’organes. L’un des effets secondaires d’une telle absorption est de provoquer de brusques crises de démence au cours desquelles la victime doit être ligotée. La première crise passe rapidement, généralement en une heure, mais la folie peut à nouveau se déclencher subitement, avec une intensité moindre, au cours des deux ou trois jours suivants. Les glandes séchées, qui ressemblent à des pois, valent 50 po pièce. Le vendeur devra toujours exhiber la peau du reptile comme preuve de la provenance exacte des glandes.
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