02 · Introduction

Lorsque les ténèbres des­cendent sur les Val­lées de l’Anduin, les Hommes du Nord de cette région se réunissent dans leurs longues mai­sons, bar­rant les portes et ali­men­tant les feux. De simples super­sti­tions n’effraient pas ce peuple hardi, appa­renté aux héroïques Edain des Jours Anciens ; même les hur­le­ments des Ouargues se fai­sant entendre de plus en plus près des fermes iso­lées ne leur pro­voquent que quelques fris­sons. L’ombre créée par les impo­sants Monts Bru­meux — depuis long­temps le repaire des Orques — recouvre la vallée de la Grande Rivière. En 3A 1640, cela fait à peine quatre ans que la Grande Peste a frappé le pays ; les Hommes du Nord doivent encore récu­pé­rer de la dévas­ta­tion coû­teuse qui s’ensuivit. Ragaillar­dis par la fai­blesse de leurs voi­sins et par le malé­fice suin­tant d’Angmar au Nord, les Orques et leurs Ouargues alliés osent frap­per de plus en plus fré­quem­ment et de plus en plus loin dans les Val­lées de l’Anduin.

Regar­dant vers l’Ouest depuis la plaine, les Monts Bru­meux aux som­mets cou­verts de neige se dressent avec défi vers les cieux. Le Haut Col coupe en plein cœur des mon­tagnes, reliant Riven­dell et les terres de l’Eriador à l’ancienne route des Nains se diri­geant vers l’Est à tra­vers la redou­table forêt de Mirk­wood. Pen­dant trois âges du monde, les voya­geurs et les peuples en migra­tion ont suivi cette route mais à ce jour le trajet est hau­te­ment dan­ge­reux. Près du sommet du col, les Orques ont creusé et bâti une de leurs célèbres for­te­resses sou­ter­raines, connue par ses voi­sins apeu­rés sous le nom de la Porte des Gobe­lins. Pro­fon­dé­ment enfouis sous la mon­tagne inter­dite, les Orques creusent des mines, forgent et se que­rellent alors que leurs sei­gneurs com­plotent la conquête des basses terres avoi­si­nantes. Au sein de Gobe­lin­ville, une redou­table ost de sau­vages guer­riers orques est déjà ras­sem­blée. Pas très loin se trouvent le domaine du Roi-Sor­cier d’Angmar et le Mont Gun­da­bad, la capi­tale des Orques, qui trans­forment le stra­té­gique site de la Porte des Gobe­lins en une menace incal­cu­lable pour les Peuples Libres.

Heu­reu­se­ment, les Humains des Val­lées de l’Anduin ne comptent pas que sur eux-mêmes pour contrer la menace des Gobe­lins. Très hauts au-dessus de la vallée de la rivière et autour des pics planent les Grands Aigles, ces créa­tures ailées les plus nobles des Terres du Milieu. Pas très loin de la porte Est des Orques, se dresse le pinacle soli­taire de l’Aire de l’Aigle, trône du majes­tueux Sei­gneur des Aigles. Peu de choses en contre­bas échappent aux regards scru­ta­teurs des Aigles ; à l’occasion, lorsque les Peuples Libres sont sur le point de courir à leur perte, l’intervention des Aigles se trans­forme en un sau­ve­tage ines­péré.

Les autres habi­tants des mon­tagnes ne sont pas non plus com­plè­te­ment per­ver­tis. Des Géants de Pierre — race ancienne de taille et d’apparence effrayantes — soli­taires et reclus vivent dans des val­lons isolés et dans des grottes. Ils n’accueillent pas à bras ouverts les explo­ra­teurs indis­crets mais ne sont pas non plus les amis des Orques. Quand l’orage gronde sur les mon­tagnes, les Géants peuvent être vus au sommet de leur art, en train de jouer à se lancer des rochers et des défis assour­dis­sants, de quoi faire trem­bler de frayeur le plus endurci des voya­geurs.

En ces temps trou­blés, le conflit est devenu bien trop fami­lier aux habi­tants des mon­tagnes et des val­lées. Les aven­tu­riers sont sûrs de trou­ver leur content de danger et d’opportunités. Plu­sieurs puis­sances s’affrontent pour impo­ser leur domi­na­tion dans un équi­libre tou­jours chan­geant.

2.1 Brève histoire de la région

Pen­dant long­temps les sau­vages Monts Bru­meux et ses val­lées voi­sines ont su pro­té­ger leur indé­pen­dance et leur iso­le­ment. Des ren­sei­gne­ments sur la région ont été col­lec­tés grâce aux tra­di­tions orales et aux récits des rares voya­geurs civi­li­sés. Pré­oc­cu­pés par leur lutte pour sur­vivre, les habi­tants n’ont pas pris la peine de noter leurs propres actions. Cela est regret­table car, d’après les légendes qui cir­culent, cette région figure au pre­mier plan de la des­ti­née des Terres du Milieu.

2.2 Les Jours Anciens et les Années Sombres

Les Elfes furent les pre­miers à contem­pler la for­mi­dable bar­rière connue sous le nom de Monts Bru­meux lors de leur légen­daire voyage vers l’Ouest sous la direc­tion du Vala Oromë. Plus tard lors du Pre­mier Âge, les Humains migrèrent de l’Est vers les terres entou­rant les Monts Bru­meux sep­ten­trio­naux. Ces tribus devinrent connues sous le nom d’Hommes du Nord.

Au début du Deuxième Âge, après la des­truc­tion du Bele­riand, les res­ca­pés des osts détruits de Mor­goth s’enfuirent vers l’Est ; de nom­breux Orques trou­vèrent refuge dans les grottes des Monts Bru­meux. Leur pos­ses­sion des hau­teurs ne se fit pas sans adver­sité. Les Géants étaient là depuis les Jours Anciens et les colo­nies minières des Nains se déve­lop­paient len­te­ment vers le Nord depuis l’immense cita­delle du Peuple de Durin connue sous le nom de Khazad-Dûm (plus tard appe­lée Moria). Comme si cela n’était pas suf­fi­sant, les Grands Aigles se posèrent sur les ver­sants, recher­chant de nou­velles aires pour rem­pla­cer celles per­dues avec la chute du Bele­riand. Durant les Années Sombres qui sui­virent, les terres à l’Est des mon­tagnes res­tèrent recu­lées, chao­tiques et désertes. ^

2.3 Le Troisième Âge jusqu’en 1640 : le retour des Ténèbres

Après le ren­ver­se­ment de Sauron lors de la Guerre de la Der­nière Alliance, le pou­voir des ténèbres dans les Terres du Milieu sera long­temps amoin­dri. Avec aucun suze­rain domi­nant sur­vi­vant, les Orques des tribus mon­ta­gnardes s’affrontèrent au cours de futiles luttes intes­tines.

Pour les Hommes du Nord, cepen­dant, le com­men­ce­ment du Troi­sième Âge se révéla être une période de pros­pé­rité et d’expansion inéga­lées. S’étendant vers le Sud le long de la rivière, les Humains des Val­lées de l’Anduin se mélan­gèrent aux tribus hob­bits abo­ri­gènes qui fai­saient leurs pre­miers pas dans l’histoire. Le lan­gage, les noms et les habi­tudes des Hommes du Nord furent faci­le­ment assi­mi­lés par les Hob­bits. Simul­ta­né­ment, les Hommes du Nord furent influen­cés par la civi­li­sa­tion avan­cée des Dúne­dain grâce au com­merce le long de l’Anduin jusqu’au royaume res­plen­dis­sant du Gondor au Sud. Lors du règne de Hyar­men­da­cil I, 3A 1015–1149, les Humains des Val­lées de l’Anduin recon­nurent l’autorité du monarque Dúna­dan.

Sauron revint en secret dans sa place forte de Dol Guldur vers 3A 1100 ; des troubles se répan­dirent rapi­de­ment dans les terres aux envi­rons des Monts Bru­meux. À cette époque, de nom­breux Hob­bits s’enfuirent vers l’Ouest par les cols des mon­tagnes. Au Nord, le Roi-Sor­cier fonda son domaine malé­fique d’Angmar vers 3A 1300, en s’étendant de chaque côté de la partie sep­ten­trio­nale des mon­tagnes. D’évidence, la pré­sence du Roi-Sor­cier imposa aux Orques de faire une trêve dans leurs conflits inter­mi­nables entre tribus, ce qui permit à la popu­la­tion de croître énor­mé­ment. Les Orques des Mon­tagnes pillèrent des avant-postes nains isolés alors que les guerres entre les Dúne­dain et l’Angmar enflam­mèrent l’Eriador.

L’Angmar ne cher­cha pas à conqué­rir les Val­lées de l’Anduin depuis son ter­ri­toire à l’Est des mon­tagnes car le gros de son armée était occupé à l’Ouest. Néan­moins, les pillages inter­mit­tents des Orques depuis leurs places fortes mon­ta­gnardes tour­men­tèrent sou­vent les habi­tants dés­unis des val­lées ne pou­vant plus espé­rer de l’aide du Gondor trop loin. Pis encore, en 3A 1635–1636, la ter­rible Grande Peste venant de l’Est balaya la région, mois­son­nant la moitié de ses habi­tants Hommes du Nord.

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