05 · Politique et pouvoir
5.1 Tharbad et le Cardolan de 1409 à 1419
Vue d’ensemble politique
Le Cardolan est un royaume successeur d’Arnor et, par extension, de Númenor et est organisé de façon similaire. Il est gouverné par un monarque héréditaire, traditionnellement l’aîné de la lignée paternelle ; jusqu’à présent, le royaume n’a jamais eu de reine à sa tête.
Alors, qu’en théorie, l’autorité du Roi est absolue, il partage en pratique le pouvoir réel avec un certain nombre de « Hiri » – barons propriétaires terriens, chargés au premier chef de la défense de leur portion du royaume. Les charges des Hirdoms sont devenues héréditaires avec le temps, bien que chaque nouvel héritier doive être officiellement confirmé au titre. Les Hiri sont aussi responsables en temps de paix de l’administration de leurs provinces, de l’édification de ponts, routes, fortifications et autres ouvrages, de la prise en charge des travaux publics, de la collecte des taxes royales et des leurs propres et du jugement des disputes civiles. Leurs suggestions et pétitions au Roi sont entendues au Conseil du Sceptre, bien que le Conseil n’agisse officiellement qu’en qualité consultative. Le Cardolan a présentement sept Hirdoms : Girithlin, Calantir, Tinare, Feotar, Tyrn Gorthad, Eredoriath et Ethir Gwathló. Le Roi a aussi le pouvoir de créer à volonté un nouveau siège au Conseil ; le Roi Ostoher éleva ainsi son Chancelier, Nimhir, à la dignité de membre en 1403.
La mort du Roi et de ses fils dans les Coteaux aux Tumulus créa un vide dans la lignée officielle de succession et présenta un problème épineux au Royaume. Deux jours après que la nouvelle de la mort du Roi ait atteint Tharbad, le Chancelier Nimhir entreprit de combler ce vide en se proclamant lui-même Régent du Cardolan, agissant au nom de l’unique héritière survivante de la maison royale du Cardolan, la Princesse Nirnadel. Ses motifs étaient simple et relativement purs ; une action rapide et en force pouvait éviter une guerre civile ou pire et permettre au royaume de se concentrer sur les problèmes critiques auxquels il avait à faire face pour son redressement. (Qui plus est, ce mouvement mettait aussi le trône hors d’atteinte des Hiri, dont beaucoup avaient traité le Chancelier de haut par le passé.) Deux semaines plus tard, lors d’une réunion du Conseil du Sceptre fort réduite et organisée à la hâte, Nimhir fut confirmé dans sa charge par deux des trois Hiri survivants-Hir Tinare et Hir Calantir. Le troisième Hir, Mablung Girithlin, s’opposa fortement à ce changement, arguant que les dangers actuels réclamaient un dirigeant à poigne de fer de formation militaire (comme lui-même). Mis sur la touche par le vote, le Hir n’entreprit toutefois aucune action publique et retourna dans son fief montagneux (pour y ruminer, présume-t-on). La Régence fut aussi supportée par le Capitaine Tardegil, actuel chef de ce qui reste des forces militaires, dont la personne est dévouée à la maison royale du Cardolan, et par Ciramir, le légat Gondorien qui, en raison de ses visées, appuie quiconque est à même de maintenir l’ordre en ville et d’assurer la pérennité des royaumes du Nord face aux agressions d’Angmar.
Avec presque la moitié de la récolte estivale détruite par les animaux sauvages ou dérobée par les brigands, le Cardolan (et particulièrement la cité de Tharbad) doit faire face à la famine durant l’automne et l’hiver de 1409. Les Hirdoms fertiles de Tinare et d’Ethir Gwathló, les moins touchés par la guerre, deviennent les cibles d’une réquisition du grain, menée à bien par des « unités de mobilisation », composées d’un mélange de soldats de l’armée régulière et de nouvelles recrues. En Hithui, le Régent dépêche une ambassade au Gondor pour y chercher de l’aide. Indépendamment de l’efficacité de ces efforts, Tharbad et la campagne environnante souffriront d’un hiver qui apporte son lot d’afflictions (y compris des maladies telles que la pellagre, le rachitisme et le scorbut) et de mécontentements (comme chez ceux qui, sans ressources, tenteront de s’emparer de celles des nantis). Des milliers de gens mourront ; seule la relative douceur de l’hiver empêchera que la situation ne s’aggrave.
A la fin de Gwaeron 1410, les navires de ravitaillement arriveront du Gondor ; l’armée, grossie par de nouvelles recrues qui veulent s’assurer de leur prochain repas, agira rapidement pour prévenir des émeutes sur les quais de Tharbad. Le Régent devra envoyer un groupe de réfugiés, fauteurs de troubles, comme colons au Minhiriath ; il devra tenter de recoloniser Tyrn Gorthad et Feotar comme assurance contre une possible expansion d’Arthedain et employer son armée agrandie pour nettoyer le centre du Cardolan-spécialement la Grand-Route du Nord – des bandits et des bêtes en maraude. Il sera aussi fort affairé à jauger les mérites des divers prétendants à la main de la Princesse Nirnadel, notamment les fils des trois Hiri et le Roi Araphor d’Arthedain. En 1411, Nimhir aura à affronter un nouveau défi, quand le chef d’une troupe de bandits qui tient encore sous sa coupe la plus grande partie de la contrée Nord se proclamera lui-même le nouvel Hir d’Eredoriath. Durant toute cette période, les forces dispersées du Cardolan tenteront de garder les frontières contre la possibilité de nouveaux assauts d’Angmar (ou d’Arthedain). L’issue de ces diverses situations à risque, de même que les fruits du labeur des espions Angmarim et des agents provocateurs d’Arthedain, peuvent être d’une importance décisive pour l’avenir du Royaume.
Normalement, le peuple de Tharbad se soucie peu de politique, mais, depuis la mort du roi, les choses ont changé considérablement. A présent, toutes les conversations tournent autour de la stabilité du gouvernement, du prochain dirigeant, etc.
5.11 Personnages importants
Tardegil, Capitaine de l’Armée
Le capitaine Tardegil est un Dúnadan, parent lointain de la Maison Royale. Grisonnant et tout couturé de cicatrices, c’est un vétéran des guerres, aussi bien contre le royaume du Roi-Sorcier que contre le « frère aîné » du Cardolan, l’Arthedain. Même si de plus jeunes officiers le raillent à l’occasion derrière son dos, nul n’ose s’en moquer en face, car il est toujours expert en lutte et en coups de poing (ainsi qu’en des formes de combat moins chevaleresques). Il appelle ses blessures et ses cicatrices, accumulées pour la plupart dans l’exercice de son devoir (y compris la longue estafilade rosâtre de son cou, souvenir de la dague d’un soldat de l’armée régulière d’Arthedain, récoltée au cours d’une rixe à l’Auberge du Repos Royal de Bree peu avant que n’éclate la dernière guerre), des « décorations honorifiques ».
Avant la bataille de Tyrn Gorthad, Tardegil et un petit contingent de réguliers étaient en poste à Thalion, pour garder la Maison du Roi et l’accès à la Grand-Route Nord contre une possible incursion des hordes d’Angmar, au cas où l’armée serait encerclée ou défaite. Bien que ce fût, de fait, une concession à ceux qui, comme le défunt Hir de Feotar, faisaient valoir que le Capitaine était trop vieux pour mener des troupes au combat, Tardegil accepta ce poste, choisit trois cents hommes d’élite qui lui étaient personnellement dévoués et érigea des défenses près de la petite ville-carrefour. Quand la nouvelle de la mort du Roi atteignit Thalion, il offrit immédiatement son allégeance à la Princesse Nirnadel.
Indépendamment de la situation politique, il demeure loyal à la Maison Royale et à la princesse, qui lui est chère. La seule autre motivation qui soit aussi importante à ses yeux est de garantir la nourriture à ses troupes. Durant l’hiver de 1409–1410, ses hommes de troupe se montreront des nettoyeurs aussi acharnés que quiconque dans la région, ne s’arrêtant qu’à la limite du banditisme ; le réel pouvoir que représente son « armée », de même que sa méfiance vis-à-vis des politiciens et sa loyauté à des idéaux abstraits, en font une force très dangereuse et imprévisible dans un environnement politique instable. Sa puissante personnalité inspire le dévouement aux hommes qui servent sous des ordres, si bien qu’il deviendrait enragé en apprenant que l’un d’entre eux ait pu être acheté.
Les autres éminentes figures militaires de cette période suivant la guerre comprennent le Capitaine Guilrod, commandant de la garnison de 100 hommes stationnée à Tharbad, Talremis, un Semi-Dúnadan de petite taille, ordonnance attitrée de Tardegil ; Amrith, le plus efficace des éclaireurs de l’armée ayant survécu, et le capitaine Asgon, grand capitaine de la flotte du Cardolan.
La Princesse Nirnadel
La Princesse Nirnadel est le seul enfant vivant du défunt Roi Ostoher. C’est une grave jeune femme de seize ans, bien éduquée et parfaitement consciente de sa positon de pion sur l’échiquier politique actuel. Elle idolâtre son « oncle favori », Nimhir, et espère qu’il prendra son bonheur futur en compte quand il lui choisira un mari. Nirnadel, avec les yeux gris et la chevelure sombre de sa défunte mère, est toujours physiquement immature. La souffrance de son peuple la concerne vraiment, et elle fait constamment enrager Nimhir et ses gardes du corps personnels en s’éclipsant pour aller prêter assistance aux Maisons de Guérison.
Par beaucoup de côtés, Nirnadel est une girouette ; mariée à un époux prévenant, elle pourrait devenir une reine capable mais elle pourrait s’aigrir et se replier sur elle-même si elle épousait un mari cruel ou sans attention. Sa seule amie intime est sa vieille nourrice Anariel de 60 ans, une femme loyale à défaut d’être supérieurement brillante, qui regarde tous les hommes (sauf Nimhir) comme des menaces pour celle dont elle a la garde.
Mablung Girithlin (Hir Girithlin)
Girithlin, un Dúnadan d’âge moyen, gouverne les terres qui longent la rivière Baranduin. Ses ancêtres appartiennent à l’orgueilleuse famille des Eldanar, qui repose dans les Coteaux aux Tumulus. Mablung Girithlin lui-même est un homme corpulent, autrefois fort comme trois hommes, mais devenu désormais quelque peu enrobé ; en dépit de cela, il demeure vaniteux et arrogant. Il est le seul Hir ayant survécu à la désastreuse bataille de Tyrn Gorthad en Urui 1409 ; il croit que les troupes furent mal dirigées au combat par le Roi et ses capitaines, bien qu’il ne le déclare pas ouvertement hors de ses propres murs. L’assertion de Girithlin quant à son droit à la couronne est basé sur le fait qu’il descend de la lignée des Hommes d’Arnor la plus élevée en noblesse après la Maison Royale ; il souhaite donner à ses prétentions une plus grande légitimité par le biais d’un mariage unissant sa maison à celle de Nirnadel, mais a peu d’espoir d’y arriver tant que le Régent se tient en travers de sa route. Bien que beaucoup croient que le fait qu’il est revenu dans son château plein de colère signifie qu’il est en train de se retirer des affaires politiques du Cardolan, rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité. Il a placé des espions à Tharbad pour contrôler les activités de Nimhir et de son gouvernement et cherche à se faire un ami de Lamril, le porte-parole des réfugiés.
Girithlin est extrêmement paranoïaque. Il se méfie du Chancelier et du Hir Tinare et déteste les Arthedain ; il croit que les Elfes de Lindon sont prêts à laisser tout l’Eriador tomber aux mains d’Angmar et à n’intervenir que quand il serait patent que leur propre sécurité serait également menacée.
Falathar Girithlin, rainé de Mablung, est un chaleureux supporter des vues politiques de son père, mais espère voler de ses propres ailes aussitôt que possible. Barahir, beau-frère du Hir Girithlin, est un vieux compagnon de beuveries du Maire Minastan. Il est un des rares auxquels se fie l’Hir Girithlin et lui sert de messager et d’informateur.
Duin Tinare (Hir Tinare)
Tinare est un spécimen atavique de premier choix des hommes de l’Ouesternesse. Il est plus jeune que Girithlin, élégant et de noble maintien, habile à manier les armes et fort cultivé, t,out en étant capable de ne pas faire montre d’orgueil dans ses affaires tant publiques que privées.
La récolte de Tinare en 1409 reste dans une large proportion peu affectée par les déprédations des Angmarim, et l’Hir Duin aura le geste apparemment noble d’offrir tous les surplus de ses vastes possessions terriennes personnelles à l’armée. En fait, ce don (ainsi que d’autres, faits en privé) aura pour effet d’acheter la loyauté d’environ une centaine de soldats, en poste à Tharbad pour la plupart, pour se prémunir contre Hir Girithlin, le Chancelier, l’Arthedain ou quiconque menacerait ses terres ou ses ambitions personnelles. L’Hir Duin brigue pour Ostomir, son bras armé, la charge de mari et de prince consort auprès de la jeune Princesse. Comme son père, Ostomir est de maintien princier et excelle dans tout ce qu’il fait. De la même façon, les deux autres fils survivants et les trois filles du Hir Duin sont de beaux exemples de lignage Dúnadan.
Celeph Calantir (Hir Calantir)
L’Hir de Calantir est vieux, noueux et déformé par les ans. Son visage est ravagé par des cicatrices de petite vérole ; il n’a plus guère de cheveux et il s’est amaigri et fragilisé. Son entêtement et sa sénilité se sont développés de concert à une allure folle ces dernières années. Lui et ses fils ont plus fait qu’aucune autre famille de l’endroit pour accroître la faible population du Cardolan, éparpillant des héritiers dans leur royaume comme dans celui des autres. Il est désireux de soutenir les ambitions politiques du Chancelier, aussi longtemps que ramée tient Orques et bandits hors de son lit. Il a six fils et huit filles survivants ; on n’en trouve jamais moins d’une demi-douzaine dans sa suite proche, attendant avec anxiété qu’il devienne une figure historique.
Nimhir, Chancelier et Régent
Nimhir est un Dúnadan suivant de la Maison Royale du Cardolan. Son père, Vinyarion fut, pendant de nombreuses armées, intendant de la maison de Thalion, poste qui échut à Nimhir à la mort de celui-ci. En 1398, le Roi Ostoher manda Nimhir à Tharbad pour qu’il le serve comme conseiller et, en 1403, le fit membre à part entière du Conseil du Sceptre. Cette dernière distinction rendit l’Hir de Tyrn Gorthad et l’Hir de Girithlin spécialement jaloux de l’influence de Nimhir sur le Roi ; citadin, peu entraîné à mailler les armes, il n’était guère (pensaient-ils) digne des charges qu’on lui avait confiées. Alors que le Chancelier a toujours tenu la Maison Royale du Cardolan dans la plus haute estime, il a été échaudé par le mauvais traitement qu’il a reçu ; comme il se sent lui-même un ardent patriote, il ne considère pas comme déplacé de prendre avantage de ses étroites relations avec la Princesse « pour le bien du pays ».
Nimhir n’est en aucune façon un meneur d’hommes, ni un guerrier, ni un grand orateur. Néanmoins, il a prouvé qu’il était un dirigeant ferme et décidé, ne tergiversant jamais pour prendre une décision, ni ne vacillant après qu’elle ait été prise ; il comprend les responsabilités du pouvoir et les conséquences de ses actions. Bien qu’il ne soit pas assez altruiste pour ignorer le gain personnel en maintenant sa position, il essaie vraiment de faire passer en premier la prospérité du pays et le bien-être de la Princesse Nirnadel.
Ciramir, Légat du Gondor
Ciramir est un diplomate cultivé qui a vu du pays. Il est bienveillant et a du savoir vivre, mais est aussi perspicace et fort versé dans la politique complexe des états du Nord. Il fut marin dans sa jeunesse et participa à la défense maritime du grand port d’Umbar, lors du siège des Haradrim (présumés très cruels) en 1379. S’il n’était pas destiné à être un guerrier, comme il fut prompt à l’admettre, il fut néanmoins capable d’embrasser une nouvelle carrière en tant que diplomate, se distinguant lors de son service à Lindon, à Fornost et à la cour du Gondor avant d’être assigné à Tharbad en 1407. Il n’aime pas Tharbad, la comparant peut-être par les yeux de l’esprit avec les grandes cités de son pays natal ou d’Arthedain, mais n’a pas permis que cela affectât son travail.
Bien que représentant d’un pouvoir étranger, Ciramir possède une grande influence dans les affaires de la ville ; son appui est crucial dans le combat politique interne du Cardolan. Les troupes et les ingénieurs qu’il commande forment une ressource estimable, très convoitée par chaque prétendant au trône. Le support que Ciramir apporte au Régent tient uniquement à ce qu’il croit qu’un dirigeant ayant des liens directs avec la Maison Royale (même s’il ne s’agit que d’une Princesse immature) a le plus de chances de garder le Pont et la Route Nord-Sud (qui sont d’une importance critique pour le commerce Gondorien) ouverts et dégagés ; son allégeance pourrait rapidement s’évanouir – si les événements devaient lui prouver que cette présomption était fausse. Dans les limites de la diplomatie et de la prudence, Ciramir est droit et honnête ; il ne peut être acheté.
Minastan, Maire de Tharbad
Minastan, un Dúnadan, fut estropié par une blessure gagnée lors d’une précédente guerre entre l’Arthedain et le Cardolan. Le Roi Ostoher le récompensa en 1396 en lui décernant la charge de Maire de Tharbad. Au fil des ans, il en est venu à réaliser que les miasmes fétides du Nin-in-Eilph semblent engendrer des voleurs, des ruffians et des propres à rien ; il a simplement restreint les activités du peu important Guet de sa ville à interdire aux pires d’entre eux l’accès au Pont et à les tenir éloignés des quartiers les plus fortunés.
Avec le vaste afflux de réfugiés à Tharbad, Minastan a été forcé de s’investir dans un rôle plus actif, utilisant le Guet pour monter la garde sur les quais et près des entrepôts afin de prévenir les émeutes d’affamés et de contrôler les bandes fluctuantes et vociférantes. Des années passées loin de l’armée ont accru sa timidité (et son tour de taille); bien qu’habité par des opinions bien ancrées, au nombre desquelles une ardente antipathie pour l’Arthedain, Minastan n’est, désormais, plus efficace quand il s’agit de parler en public ou d’émouvoir une foule. C’est dans le domaine administratif que se révèlent ses capacités les plus fortes en tant que Maire, lorsqu’il négocie avec les représentants des guildes de la ville ou les délégations commerciales de Fornost, de Lindon, des Montagnes Bleues et du Gondor.
Lamril
Lamril vivait à l’origine dans la petite ville de Tharaman, où il exerçait le métier de forgeron à la suite de son père. Sa voix à la parole éloquente aurait pu être confinée à jamais à la conversation avec ses apprentis et ses voisins dans la forge du village, mais le danger imminent d’une force d’Orques ou pire força les villageois à s’enfuir vers la sécurité relative de Tharbad. Ce soudain changement l’a propulsé sur la scène de l’histoire, car il est devenu un champion des droits et des besoins des réfugiés sans foyer. En partie pour tirer avantage de sa grande popularité parmi les réfugiés et en partie pour l’expulser de Tharbad, le Chancelier Nimhir mettra Lamril à la tête de l’effort de colonisation dans Minhiriath au printemps de 1410.
Tout d’abord, Lamril parlera pour les droits des réfugiés déplacés sans idée de profit personnel. Mais tout orateur doué du pouvoir de mobiliser une foule nourrit en lui, peu ou prou, une certaine mégalomanie et Lamril n’y fait pas exception. Lamril est un homme simple, sans sophistication, d’origine Dunlending ; il n’est pas subtil et peut devenir une proie facile pour des manipulateurs, que ce soit le Chancelier, l’Arthedain, n’importe lequel des Hiri, ou même l’Angmar. Têtu et susceptible, ce spécimen physiquement imposant est probablement le meilleur choix pour diriger une colonie dans une contrée sauvage, en butte aux animaux féroces, aux saboteurs, au climat rude et aux pêcheurs barbares.
Autres personnages importants
Dirhavel l’Alchimiste et Brethil le Marinier sont tous deux déterminés à aider le Chancelier Nimhir à reconstruire la nation (Dirhavel par son appui tacite et ses recherches expérimentales sur le Silima, Brethil en mettant à disposition le Tindomerel pour la mission de transport de grain). Ancalime, la plus riche tenancière de la ville, se soucie peu des partis, les affaires étant stables quel que soit l’état de l’économie. Lothiriel la joaillière et Eilwen l’aubergiste ont laissé prise au désespoir, espérant simplement survivre assez longtemps pour voir le printemps apporter quelque soulagement à leurs familles. Firiel des Maisons de Guérison reconnaît que la ville a le moral bien bas et tente de l’alléger en distribuant les surplus des Maisons, mais elle a assez à faire elle-même en luttant contre l’épidémie sur la Rive Nord. Enfin, Hoegwar l’espion et la paire à la mauvaise réputation que forment Thordil et Brego se réjouissent des troubles actuels. La mission d’Hoegwar semble en bonne voie de réussite, cependant que Thordil et Brego se sont aperçus que de nombreuses filles sont si désespérées de n’avoir pas à manger qu’elles rejoindront d’elles-mêmes le réseau de traite des blanches sans coercition aucune.
5.12 Forces militaires
L’armée du Cardolan, avant la grande guerre de 1409, comptait environ 400 Requain (chevaliers), 2500 fantassins réguliers et mercenaires et quelques 15 à 16000 manieurs de lances réquisitionnés, ayant subi un entraînement minimum. Chaque Hir possédait également une suite à cheval et des gardes du corps qui se répartissaient comme suit : Tyrn Gothad 100, Eredoriath 160, Feotar 140, Calantir 150, Girithlin 140, Tinare 110 et Ethir Gwathló 80. Pratiquement 80 % de l’armée du Cardolan périt dans la bataille autour de l’Apogée du Climat et dans la dernière défense désespérée des Coteaux aux Tumulus ; les troupes personnelles des Hiri souffrirent en proportion. Seules celles des Hirdoms du Sud et les quelques troupes laissées sous le commandement du Capitaine Tardegil près de Thalion survécurent en nombre.
En conséquence, une des préoccupations les plus urgentes pour le Chancelier Nimhir est de maintenir l’armée en tant qu’unité cohésive-loyale, nourrie et en ordre de marche –et d’augmenter sa force aussi rapidement que possible. Le recrutement n’est cependant pas aussi formidable que ce à quoi on pourrait s’attendre dans la mesure où les réguliers de l’armée sont parmi les quelques citoyens qui sont relativement assurés de recevoir des repas de façon suivie dans les mois à venir. Qui plus est, Nimhir a fait réquisitionner presque tous les chevaux valides du royaume pour l’usage de l’armée. Le Cardolan possède aussi une petite flotte, qui se compose de six galéasses légères, employées en premier lieu pour la défense côtière et les patrouilles sur la rivière. Quatre de ces bateaux sont normalement mouillés à Talsir et les deux restants à Tharbad ; tous les six ont survécu à la guerre sans dommage.
5.2 Cardolan et Tharbad en d’autres temps
La période 1409-12 a été choisie comme arrière-plan de ce module d’aventures car, pour le Cardolan, c’est un temps de grand tumulte ; pour les Personnages Joueurs, néanmoins, c’est un temps riche d’opportunités. En conséquence, toute prévision de l’histoire ultérieure de Tharbad et du Cardolan peut être grandement affectée par ce qui se passera durant cette période. Néanmoins, la description des futurs événements probables qui suit est fournie au MJ afin de l’aider à établir une perspective pour développer des aventures dans cette région en d’autres temps.
Durant tout l’été de 1412, le Régent Nimhir réussit à déplacer délicatement les ressources qui restaient dans le royaume sur l’échiquier qu’était le Cardolan. Il monta habilement prétendants et Hiri les uns contre les autres jusqu’à ce que son ennemi aigri, l’Hir Girithlin, tentât un coup d’état. Girithlin essaya de kidnapper la Princesse Nirnadel pour la forcer à épouser son fils Falathar, sa prétention au trône devenant un fait accompli. Nul ne sait si ce plan bizarre fut inspiré ou facilité par les agents de l’espion Angmarim Hoegwar. Quelle que fut sa source, cette tentative fut pire qu’un échec : elle se solda par la double mort de la Princesse et du Régent et plongea la nation dans une sanglante guerre civile entre les supporters de Girithlin et ceux de Tinare (les MJ peuvent choisir par eux-mêmes l’issue du conflit). Quand finalement la poussière se redéposa, le Légat Gondorien plaça l’appui du Royaume du Sud derrière le nouveau dirigeant, espérant (à nouveau) que cet appui découragerait une rébellion ultérieure et assurerait une continuité dans la surveillance des chaussées et de la Route Nord-Sud.
Durant les vingt années qui suivirent, ce successeur (qui adopta le titre de Kanotar ou Grand Commandeur) fut capable de maintenir la stabilité au Cardolan à un niveau superficiel, car nul soulèvement d’importance ne se produisit. Les efforts de colonisation commencés sous le bref règne de Nimhir furent également une réussite, reculant les frontières politiques du Cardolan et fournissant d’importantes nouvelles sources alimentaires et économiques (ainsi découvrit-on de l’alun au Saralainn en 1423).

Néanmoins, la perte du dernier héritier en titre de la lignée du Roi eut un effet subtil en profondeur sur le peuple et les Hiri du Cardolan, minant leur loyauté à leur chef et au royaume. En 1420, la plupart des Hirdoms répugnaient à contribuer à tout effort qui ne leur profitait pas directement autrement que par une assistance symbolique ; la collecte des impôts était devenue une tâche ardue qui nécessitait fréquemment l’appui de troupes ou de mercenaires engagés pour la circonstance. Qui plus est, une grande partie de Tyrn Gorthad, de Feotar et d’Eredoriath n’avait été repeuplée et restaurée que d’une façon marginale et il y restait beaucoup de prédateurs indigènes (tant hommes que bêtes).
Durant les années 1430, la dépendance croissante du Cardolan vis-à-vis de l’aide que lui apportait le Gondor devint plus manifeste encore, lorsque des événements sinistres affaiblirent encore plus la cohérence du royaume. La Garden du Légat Gondorien (qui avait souvent été « empruntée » par le Kanotar pour être assignée à d’importantes besognes relatives à la sécurité) fut rappelée au Gondor au 1434, dès le début de la sanglante Lutte Fratricide ; Ciramir (qui pendant tant d’années avait exercé au Cardolan une influence patriarcale de bon ton) fut forcé de se mettre à supplier à son tour, requérant (et obtenant de mauvaise grâce) qu’on alloue 300 hommes de troupe à son service. Les agents Angmarim à Tharbad, voyant une occasion en or dans cet affaiblissement, se surpassèrent, fomentant des révoltes contre les impôts, en même temps au Calantir et au Saralainn. Lamril, agissant sur la foi de messages reçus en rêve et sentant le mécontentement général (bien que se trompant quant à sa source jusqu’à ce qu’il fut trop tard), proclama qu’il était la « vraie voix du peuple ». Il marcha sur Tharbad à la tête d’une bande d’insoumis qui se composait de fermiers maniant la fourche, de miliciens provenant de localités du Saralainn, de mercenaires Dunlendings courroucés par la coupe sombre faite dans les gages qu’on leur avait promis et d’une mystérieuse petite formation de magiciens, menés par un magicien réservé mais puissant du nom de Gaurthring (qui était lui-même ligué avec Angmar ). Cette force fut stoppée et dispersée tout près de la cité, après un considérable bain de sang dans les deux camps. Durant la bataille, Lamril découvrit les noirs desseins de Gaurthring. Mais avant qu’il puisse agir, il fut tué par le fourbe Mage, de même qu’une large fraction des hommes valides du Saralainn-lequel tomba par la suite sous la domination politique des Hiri du Sud.
Pendant l’été de 1439, un émissaire de l’usurpateur Gondorien Castamir arriva à Tharbad. Au lieu d’offrir un paisible conseil comme son prédécesseur (qui avait été forcé de s’enfuir en exil en Arthedain), le nouveau Légat demanda un tribut annuel substantiel pour prix de l’amitié renouvelée du Gondor. Le Kanotar essaya de satisfaire à cette demande en promulguant un nouvel ensemble de droits de passage et de tarifs douaniers ; les Hiri de Tyrn Gorthad et de Girithlin y répondirent en se déclarant eux-mêmes indépendants de l’autorité du Kanotar et furent capables de maintenir cette indépendance en dépit de la donation par Castamir de deux cent mercenaires Variags (qui furent détruits alors qu’ils tentaient de pourfendre, de violer et de piller au nom du Gondor). Même le renversement de Castamir et le retour d’exil de Ciramir âgé ne purent apaiser l’aliénation de ces provinces frontalières. Bien que les Hiri se fussent accordés sur le fait que le danger que représentait Angmar était plus important que leurs différences personnelles, ils ne voulurent plus dès lors prêter serment d’allégeance au Kanotar.
Depuis cette époque, le Cardolan devint une désignation géographique plutôt que politique. Au milieu du siècle, le « royaume » du Cardolan n’était plus qu’une association lâche de provinces largement autonomes. Des campagnes organisées durant cette période devraient le dépeindre comme un endroit véritablement très dangereux, avec les provinces du Nord comme cibles des raids Angmarim toujours fréquents, le Saralainn retournant pour une grande part à l’état sauvage et Tharbad elle-même sombrant toujours plus profond sous la coupe des corrompus et des malhonnêtes. Bien qu’un Conseil du Sceptre existât encore nommément, il se réunissait fort peu et pouvait encore plus rarement tomber d’accord sur une action commune. Le fief du Kanotar, même avec le retour d’un appui symbolique du Gondor, était réduit à Tharbad elle-même, au Calantir et à tout autre Hirdom qu’il pouvait cajoler ou acheter pour avoir sa faveur temporaire.
Durant cette période, l’une des quelques raisons qui pouvaient amener les Hiri à se ranger pour un temps sous la même bannière était les tentatives répétées du Roi Araphor d’Arthedain pour réunir Arnor sous sa loi. Une force expéditionnaire envoyée au Cardolan par Araphor en 1455 fut la première de plusieurs entreprises aventureuses du même type qu’il mît sur pied durant son long règne *quel s’acheva en 1589). La position des combattants varia considérablement d’une guerre à l’autre et quelques Hirdoms combattirent effectivement pour l’Arthedain pendant certains de ces conflits. Araphor apprit rapidement (et douloureusement), quoi qu’il en soit, que ses alliances avec les Hiri du Nord du Cardolan étaient construites sur de la boue ou des sables mouvants, se désintégrant d’habitude à la première occasion dont ceux-ci pouvaient tirer parti. Alors que les états du Cardolan étaient en définitive capables de repousser toutes les avances d’Araphor, chaque escarmouche réduisait de plus en plus le nombre déjà bien faible des Dúnedain du Nord.
La Grande Peste qui balaya l’Eriador en 1636–37 fut plus dévastatrice pour le Cardolan que pour toute autre région. Tharbad avait toujours été une terre d’élection pour les maladies comme pour les voleurs, ce qu’accroissait encore la présence des environs marécageux du Nin-in-Eilph ; le germe, une fois introduit dans la cité, se répandit rapidement en aval. Plus de 85 % des habitants de Tharbad et presque 80 % de la population de Minhiriath moururent dans les mois qui suivirent. La Peste, mystérieusement, s’acharna tout particulièrement contre les Dúnedain ; à peine une poignée des hommes de cette race survécut, fuyant au Nord vers l’Arthedain. Les autres survivants, cependant, continuèrent à habiter Tharbad et d’autres villes du Cardolan, sans être dérangés, pendant des centaines d’années après cela, bien que dans un état de splendeur fort diminué.
L’Ancienne Route Sud continua à être une importante voie de commerce jusqu’à la mort du Roi Arvedui d’Arthedain et la défaillance du dernier des Royaumes Septentrionaux en 3A 1974. Néanmoins, la disparition de toute sorte de gouvernement central ou d’armée au Cardolan signifia que ceux qui s’aventuraient hors des murs des quelques colonies isolées devinrent la proie des bandits de grands chemins ; Tharbad, tombée en ruines sauf dans le vieux quartier Sud de la ville, devint un repaire grouillant de vide-goussets, de voleurs de bétail, de pirates, de négociants et marchands peu scrupuleux et de propres à rien de tout poil.
Après la chute de l’Arthedain et l’extinction de la lignée royale du Gondor, le trafic le long de la route Nord-Sud déclina grandement. La route elle-même n’était plus entretenue et tomba en ruine en de nombreux endroits. Le peuple du Cardolan maintint cependant toujours un contact commercial avec les hommes de Bree et dans les années ultérieures avec le nouveau royaume du Rohan. Des histoires du cru affirment que nombre de vaillants guerriers de Tharbad se distinguèrent en participant aux nombreux conflits, entre les Rohirrim et les Dunlendings, qui se déroulèrent entre 2699 et 2759 du 3A (bien qu’on soit loin d’être sûr du côté duquel ils combattirent).
Tharbad devint complètement déserte à l’époque des grandes crues de 3A 2912 quand le Gwathló engloutit les chaussées et le pont maintenant décrépits et se rua à travers ce qui fut jadis une ville fière. Les derniers résidents furent forcés de partir en grande hâte, laissant derrière eux des ruines inondées. Les terres autour de la ville retombèrent rapidement à l’état de marécages à l’abandon, remplis de serpents, d’alligators et d’autres créatures des marais. Dans les derniers jours du Troisième Age, l’histoire nous rapporte que des espions de Saroumane, les Noirs Cavaliers du Mordor et Boromir du Gondor traversèrent tous la dangereuse Tharbad, qui alors ne consistait plus qu’en morceaux affaissés de chaussées, en constructions en ruines sur des tertres vacillants et en un dangereux gué formé par les ruines du pont (Boromir y perdit son cheval en traversant). Il est probable que d’autres y soient passés aussi à cette époque, portant des messages au Nord ou au Sud, ou examinant avec attention les derniers restes d’une ville autrefois altière, à la recherche de quelque objet de valeur, souvenir d’un âge ancien.
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